harvey-milk-fr1Le nouveau Gus Van Sant retrace le parcours éphémère du premier politicien ouvertement gay d’Amérique, assassiné il y a 30 ans. Un film-événement entre épopée politique et chronique intimiste, où Sean Penn trouve l’un de ses rôles les plus marquants.

Le film s’ouvre sur des images d’archives : des descentes de police dans les bars gay au milieu des années 1960, des homosexuels arrêtés, menottés, se cachant le visage. La conclusion se fera sur d’autres images : celles de milliers de gays et lesbiennes défilant à visage découvert dans les rues de San Francisco, une bougie à la main. Nous sommes à l’aube des années 1980. Entre ces deux moments, le parcours d’Harvey Milk, premier homme politique ouvertement gay à être élu à une charge politique, mais aussi le parcours de toute une communauté en quête de reconnaissance et d’acceptation.

Pour ce nouveau film, le réalisateur Gus Van Sant s’attelle à une reconstitution de ce que furent les premières années de revendication gay. Tout en prenant soin de recréer un style propre aux années 60-70 dans les décors, costumes ou coiffures, le réalisateur de « My own private Idaho » et d’« Elephant » effectue un remarquable travail de stylisation. Les séquences super-8 ou en split-screen rendent une impression d’immersion dans l’époque, accentuée par l’utilisation pertinente de documents d’archives.

Dans cette œuvre tour à tour épique et intimiste, les personnages brossent le tableau de toute la diversité qui compose la communauté gay du Castro. A commencer par un Sean Penn amaigri, subtilement efféminé, en revendicateur infatigable. L’acteur, dont la performance vient d’être récompensée par un Oscar, se met avec une étonnante sincérité au service du discours d’Harvey Milk et le porte avec beaucoup d’engagement et de sensibilité. Dans le rôle de son premier grand amour, un James Franco moustachu, sexy et touchant, « clone » typique des années 70. Emile Hirsch, affublé d’une perruque et de lunettes, apporte naïveté et enthousiasme au personnage de Cleve Jones. Quant à Diego Luna, il est étonnant dans le rôle de l’amant paumé, aussi émouvant qu’énervant.

Film biographique, « Harvey Milk » n’en est pas moins une extraordinaire leçon sur la politique américaine, mosaïque de communautés, tiraillée entre pudibonderie religieuse et esprit de tolérance, qui s’illustre dans les rapports ambigus, empreints de jalousie et de fascination, que Gus Van Sant choisit de montrer entre Harvey Milk et son collègue au sein du Conseil municipal Dan White, brillamment incarné par Josh Brolin.

Parlant du besoin universel de reconnaissance, d’acceptation et de respect revendiqué par chaque être humain, « Harvey Milk » permet de ressentir avec beaucoup d’émotion le souffle du mouvement gay de l’époque, avant-goût ce que l’on appellera plus tard la « fierté gay ». Il permet ainsi aux jeunes générations de se plonger dans les événements qui font partie de l’histoire de la communauté gay, mais sans doute également de l’histoire tout court. Et de mesurer le chemin qu’il reste encore, 30 ans après, à parcourir.

 « Harvey Milk » (Milk) de Gus Van Sant, 2008. Avec Sean Penn, James Franco, Emile Hirsch, Josh Brolin, Diego Luna, Alison Pill.
Au cinéma dès le 4 mars 2009.

Harvey Milk
Une touchante et importante revendication. 8
8SUR 10