neon-demon-the-fr1Le nouveau film de Nicolas Winding Refn, réalisateur de « Drive », est une œuvre parfois excessive et à l’esthétisme très présent, on y retrouve cependant une thématique forte et intéressante qui, au début de sa filmographie, traversait déjà la trilogie choc « Pusher » (à voir absolument !) : la dévalorisation et la marchandisation de l’être humain.

J’ai été très séduit par les deux premiers tiers de ce film qui voit Jesse, une jeune-fille de 16 ans, débarquer dans le milieu de la mode à Los Angeles avec le rêve de devenir modèle.  Porteuse d’une fraîcheur, d’une beauté naturelle et d’une innocence que les autres ont perdues, elle va fasciner et séduire mais aussi être jalousée.

Pour l’interpréter, Elle Fanning est un choix parfait. Cette actrice très jeune elle aussi (18 ans) possède un visage et un regard capables de livrer les émotions les plus diverses et contraires avec une grande virtuosité. On peut ainsi y voir l’innocence se pervertir, se transformer en manipulation ou en dédain. Une actrice fascinante, comme son personnage.

Le milieu des top-modèles est un milieu idéal pour parler de la marchandisation de l’être humain et de l’asservissement des êtres et de leurs corps. Et donc aussi d’une sorte de déshumanisation. Grâce aux situations et à la mise en scène aux partis-pris très esthétique (les séquences ressemblent à une suite de mise en scènes pour des photographies de magazine de mode où les jeunes-femmes sont réduites à des objets), ces thèmes sont très présents et parfaitement illustrés. Il faut d’ailleurs mentionner un travail technique impressionnant donnant lieu à des images très travaillées, de styles très divers et absolument sublimes.

Dans le film, il est aussi question de rapport à la beauté, à une sorte de perfection. Les personnages qui gravitent autour de Jesse ont ainsi chacun une façon de se mettre en rapport avec cela. La jeune-fille va ainsi être le révélateur de certains des pires aspects de l’être humain : son avidité, sa cruauté, la jalousie, des obsessions perverses, le besoin de posséder ce qui est beau. Ou de le détruire. Car le film pose un regard très sombre sur notre rapport à la beauté, Jesse ne rencontrant aucune bienveillance et commençant même elle-aussi à être pervertie par le milieu dans lequel elle évolue.

C’est d’ailleurs ce regard sombre et violent qui prend de plus en plus le dessus et, dans la dernière demi-heure, entraîne le film et son scénario dans un trip horrifique excessif et qui, de la nécrophilie à l’éviscération en passant par le cannibalisme, ne nous épargne pas. Par trop d’excès, le scénario perd surtout et malheureusement le fil des intéressantes thématiques traitées jusque-là.

Malgré cela, « The neon demon » est un vrai film d’auteur, audacieux, intéressant, visuellement superbe et au pouvoir de fascination bien réel.

« The neon demon » de Nicolas Winding Refn. Avec Elle Fanning, Jena Malone, Karl Glusman, Abbey Lee, Bella Heathcote, Keanu Reeves.
Au cinéma dès le 8 juin 2016.

The neon demon
L'horreur de la beauté ! 7
7SUR 10