Audacieux par la forme autant que par le propos, «L’homme de sa vie», deuxième film de Zabou Breitman, peint avec tact et sensibilité la remise en question du couple.
Comme chaque année, Frédéric et Frédérique, mari et femme, passent des vacances idylliques dans leur maison de la Drôme, entourés de leurs enfants et du reste de leur famille. Un soir, ils invitent leur voisin Hugo, un homosexuel solitaire, à passer la soirée avec eux. L’arrivée de cet homme au style et aux choix de vie différents, et la relation qu’il va nouer avec Fréderic, le père de famille, va bouleverser petit à petit leurs univers.
En opposant le concept de famille comme forme unique et établie dans notre société à un style de vie plus libre et individualiste, la réalisatrice de «Se souvenir des belles choses» touche avec audace à des thèmes délicats, et les remets en question avec intelligence et surtout beaucoup de respect, d’humanité et une très grande liberté de point de vue. Des notions qui vont déterminer le ton et la forme de tout le film.
Il y a d’abord des images incroyablement belles et une mise en scène libre, inventive et résolument contemporaine : on rejoue une scène deux fois en la présentant du point de vue de deux personnages, on filme le détail d’un corps ou d’un paysage alors que la scène se joue hors-cadre et en voix off, on superpose plusieurs images sur un même plan, on se sert du montage pour déconstruire la logique du temps dans le récit… et, à chaque fois, ces effets prennent du sens et ajoutent de l’émotion.
Ensuite, le jeu des acteurs est d’une sincérité profonde et absolue. Que ce soit Bernard Campan sympathique, amoureux et blessé, Charles Berling amusant et mystérieux ou Léa Drucker bouleversante en mère de famille qui perd pied, ils sont simplement là, sincères et vrais.
Dès lors, à l’image de la grand-mère qui dit «je ne suis pas d’accord, mais je te comprends», aucun jugement n’est possible ni prononcé dans le film, aucune réponse n’est donnée. Il y a juste les questions que se posent des êtres humains qui essayent de se positionner et d’aimer dans une vie qui est, par essence, imprévisible et imparfaite. «L’homme de sa vie» fait ainsi le choix du cœur, de la fragilité des êtres et de l’humanité et se place brillamment et très justement bien au-delà d’un quelconque préjugé ou de toute idée préconçue. Un coup de coeur, un vrai, pour ce très beau film !
« L’homme de sa vie » de Zabou Breitman, 2006. Avec Léa Drucker, Charles Berling, Bernard Campan.
Au cinéma dès le 11 octobre 2006.